Homélie du 2ème dimanche du carême

Là, tu l’élèveras en montée
Gen 22,1-18; Rom 8,31-34; Mc 9,2-10

Par Ignace Plissart

Une fois n’est pas coutume. Aujourd’hui, au lieu de commenter l’évangile, nous porterons notre
attention sur la première lecture : le récit du sacrifice d’Abraham.
Pourquoi ce choix ? Pour trois raisons.
– La première: Le récit du sacrifice d’Abraham a profondément marqué l’inconscient collectif de
l’Occident, ainsi que la réflexion chrétienne sur le sens de la mort de Jésus et sur le mystère de ce
qu’on appelait jadis ‘le Saint Sacrifice de la messe’.
– La deuxième raison découle de la précédente : ce récit nous donne une image inacceptable du
divin. Un Dieu qui pour éprouver la foi d'un père, lui demande d'offrir son fils en holocauste, est,
pour l'homme de bon sens, un faux dieu.
– La troisième raison : les exégètes contemporains reprochent aux traductions et aux commentaires
habituels de ce récit de commettre trois graves contresens.
Dans mon travail de relecture, je me suis appuié sur les observations d’André Wenin, exégète belge,
enseignant à Lumen Vitae et de Marie Balmary, psychanalyste et exégète croyante.
Le récit commence par un appel, et une réponse : « Abraham ! » – « Me voici ! »
Il se poursuit par un ordre : « Prends ton fils, ton unique, celui que tu aimes, Isaac ; va pour toi en
terre de Moryah, là, élève-le en montée sur l’un des monts que je te dirai. » Je traduis : « Adviens à
toi-même (à ta dignité de vrai père) ! Pour ce faire, élève ton fils vers moi. » Dans le texte hébreu,
aucune allusion à un sacrifice sanglant. Seulement une invitation à « élever l’enfant en élévation ».
Invitation qui rappelle à Abraham son rôle de père à l’égard d’Isaac : tu dois élever ton fils!
D’accord, le texte hébreu peut prêter à confusion. Influencé par la culture de son temps, Abraham
crut comprendre qu’il lui fallait sacrifier son fils.
Dès le matin, il part en terre de Moriah, avec Isaac, 2 ados, 1 âne, 1 torche et 1 coutelas (μαχαιρα :
petit couteau de sacrifice – non pas un glaive). Arrivé au pied de la montagne, Abraham invite les
deux ados à les attendre : « Nous nous prosternerons, puis nous reviendrons vers vous. » Ces mots
trahissent le malaise profond d’Abraham. C'est comme s'il doutait que sa démarche soit voulue par
Dieu.
Au cours de montée, Isaac interroge son père : « Voici le feu et le bois. Où est l’agneau de la
montée ? » Sa question en sous-entend une autre : « L’agneau, serait-ce moi ? »
Troublé par la question de son fils, Abraham évite de lui répondre : « Élohim verra pour lui l’agneau
de la montée, mon fils ! » Le doute le reprend.
Arrivé au sommet, Abraham dresse un autel, y place son fils bras et jambes liées. Au moment où il va
frapper, l’Ange de Yahvé crie des ciels : « Abraham, Abraham, ne lance pas ta main vers
l’adolescent, ne lui fais rien de mal ! »
Sur le champ Abraham retient son bras meurtrier. C’est alors que Élohim lui dit : « Oui, maintenant,
je sais que tu frémis d’Élohim, que tu crois en Élohim ! »
Comment comprendre le ‘Maintenant, je sais’ ?
Deux lectures sont possibles : « Ayant constaté que tu étais prêt à sacrifier ton fils, je sais maintenant
que tu crois en moi » ou « Constatant que tu viens de renoncer à sacrifier ton fils, je sais maintenant
que tu crois en moi ». Cette deuxième lecture non seulement colle mieux au mot ‘maintenant’, mais
sauve Élohim du reproche d’avoir acculé un père à vouloir sacrifier son enfant.
Élohim poursuit son propos.
Ici encore deux traductions s’affrontent, la classique et l’autre. Grammaticalement l’autre lui est
préférable : le ‘pour moi’ doit devenir ‘loin de moi’ . Ce qui donne ceci : « Tu n’as pas retenu loin
de moi ton fils ton unique » au lieu de « Pour moi, tu n’as pas épargné ton fils ton unique »
C’est à ce moment précis, qu’Abraham comprend qu’il s’était mépris sur le contenu de l’ordre du
Seigneur. Jamais Élohim ne lui avait demandé de sacrifier son fils Isaac, Il lui avait demandé autre
chose. Mais quoi ? La suite du récit va nous permettre de le savoir.

HomélieB_Car02b_Elève-le- moi
Remis de ses émotions, Abraham remarque un bélier saisi au hallier par les cornes. Qu’est-ce qu’un
bélier ? Le mâle de la brebis, le père de l’agneau, le symbole de la paternité. Que fait Abraham ? Il
prend le bélier et l’offre en sacrifice. Ce faisant, Abraham offre en sacrifice sa paternité toute
puissante, le lien fusionnel et dominateur qui l’unissait à son fils.
Ayant offert son lien mortifère, Yahvé bénit Abraham : « Je multiplierai ta semence comme les
étoiles des ciels, comme le sable sur les lèvres de la mer. »
Le récit s’achève sur cette remarque du rédacteur : "Abraham retourne vers les adolescents restés au
pied de la montagne et avec eux rejoint Beer-Sheba." Isaac ne le suit pas. Il reste avec Élohim. Grâce
à l’offrande du lien qui le ligotait à son père, l’ado est advenu à sa dignité de fils de Dieu. Alors que
jusqu’ici Isaac était parlé par son père, il peut maintenant parler une parole qui n’est pas parlée par
un autre, une parole parlée à partir de sa dignité de fils de Dieu.
Le dépoussiérage de ce récit m’amène à quelques réflexions :
Y a t il eu quelque chose de sacrifié ? Oui. La ligature d’Isaac. Le sacrifice d’Abraham s’est opéré en
acceptant de mettre son fils en présence de Yahvé, en acceptant d'accorder à son fils sa liberté
d’homme, de vis-à- vis de Dieu.
Le sacrifice d’Abraham est exemplatif pour tout père et toute mère d’un enfant. Nous n’avons pas le
droit de maintenir nos enfants captifs. A l’inverse, nous avons à les libérer progressivement de ces
liens faussement protecteurs qui les empêchent d’exister, de vivre pleinement, de parler à partir
d’eux-mêmes.
Vous comprenez aussi le danger qu’il y a eu dans le passé à interpréter la mort de Jésus en croix à la
lumière du sacrifice d’Abraham, tel qu’habituellement commenté.
Cet admirable verset de Jean « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son fils unique, …» peut être
si mal compris ! Ceux qui pensent que Dieu a disposé de la vie de son fils comme Abraham de celle
d’Isaac, se trompent lourdement. L’union de Jésus à son Père n’a souffert d'aucune ligature. En bon
père, Dieu devait souhaiter que l’homme Jésus, son fils unique, parle et agisse à partir de lui-même,
qu'il atteigne la plénitude de son humanité aimante, et qu'il devienne à son tour « père d’une
multitude ».
Le « coutelas d’Abraham » qui finalement ne servira qu’à couper les liens d’un père avec son fils se
retrouve, tel quel, en Mat 10,34 ; ce petit couteau établit une connexion entre le récit du sacrifice
d’Abraham et cette parole énigmatique de Jésus : N’allez pas croire que je sois venu apporter la paix
sur la terre ; je ne suis pas venu apporter la paix, mais le coutelas (μαχαιρα : petit couteau de
sacrifice). Car je suis venu opposer l’homme à son père, la fille à sa mère et la bru à sa belle-mère :
on aura pour ennemis le gens de sa maison. » Mt 10,34
Effectivement, la paix qu’apportait Jésus à ses contemporains, entraîna, dans un premier temps, la
division des familles juives ou païennes concernées par la conversion d’un de leurs membres. Cette
division se prolongeait aussi longtemps que les parents non chrétiens et païens se refusaient de
« sacrifier » les ligatures qui maintenaient leur fils ou fille converti sous leur coupe.

Homélie du 1er dimanche du carême

Revisitons notre baptême !
(à travers le baptême des Douze)

Par Ignace Plissart

En ce début de Carême 2018, la liturgie nous invite une nouvelle fois « à raviver la grâce de
notre baptême » comme on ravive les braises d’un feu au petit matin.
Mais revisiter notre baptême est une gageure ! Et ce, pour deux raisons ; la première : nous
n’en avons aucun souvenir, puisqu’il nous fut imposé à la naissance ; et la deuxième raison :
les baptêmes d’enfants auxquels nous aurions assisté, sont de très mauvais exemples pour
nous introduire dans le mystère de notre baptême, car ces baptêmes, réduits à un rite et à une
formule, ont perdu ce qui en faisait leur puissance spirituelle : l’engagement personnel du
catéchumène.
Alors comment mener notre enquête ? Je propose, dans un premier temps, de relever dans le
N.T. quelques passages où l’on parle du baptême. Il y a toute chance qu’on y apprendra
quelque chose d’utile pour notre enquête !
1. Au Jourdain, le prophète Jean prêchait un baptême de conversion ; il adressait son appel à
des adultes déçus par les promesses de leurs religions respectives. Entendez « conversion »
dans le sens d’un passage d’une obéissance servile à des préceptes, vers une obéissance
confiante à Dieu autre et en sa Parole. Jean disait : « Moi, je vous baptise dans l’eau, mais
vient après moi celui qui vous baptisera dans l’Esprit Saint (et le feu). » Mc 1,8 – Ici le
baptême dans l’Esprit Saint qu’évoque Jean ne sera pas lié à un rite.
2. Encore au Jourdain : Après avoir été baptisé par Jean, Jésus sortit de l’eau, et voici que les
cieux s’ouvrirent et il vit l’Esprit Saint descendre telle une colombe, et voici qu’une voix
venant du ciel se fit entendre : « Tu es mon Fils bien-aimé, en toi j’ai mis toute ma
complaisance » Mc 1,10 – Ici la descente de l’Esprit Saint s’opère hors rite.
3. Lors de la montée de Jésus et de ses disciples vers Jérusalem, Jacques et Jean demandèrent
à Jésus de pouvoir s’asseoir à sa droite et à sa gauche, càd de pouvoir partager son pouvoir.
Jésus leur répondit : « Êtes-vous prêts à être baptisés dans le baptême dans lequel je serai
baptisé, et boire à la coupe à laquelle je vais boire ?» Ils répondirent « Oui, nous le
pouvons !» Mc 10,38 – Ici le baptême équivaut à être associé à la mort de Jésus.
4. Quelques jours après sa Résurrection et avant son Ascension, Jésus dit aux siens : « Jean
vous a baptisés dans l’eau; d’ici peu de jours, c’est dans l’Esprit Saint (et le feu) que vous
serez baptisés » Act 1,5 – Ici le baptême d’eau est clairement dissocié du baptême dans
l’Esprit qui leur sera donné à la Pentecôte, sans rite.
5. Quelques années plus tard, Pierre et Jean descendirent chez les Samaritains et prièrent pour
eux, afin que l’Esprit Saint leur fût donné. Car il n’était tombé sur aucun d’eux ; ils avaient
seulement été baptisés au nom du Seigneur Jésus. Act 8,14 – Le baptême de l’Esprit Saint
apparaît ici comme l’aboutissement du baptême chrétien, et une nouvelle fois sans rite.
6. Plus tard encore, dans sa lettre adressée aux Romains, Paul écrit ceci : « Ignorez-vous que
baptisés dans le Christ, c’est dans sa mort que vous avez été baptisés (et pas seulement
dans sa résurrection) " Rom 6,1-3
Sur base de cet inventaire (incomplet), nous constatons que le baptême chrétien est moins un
rite qu’un engagement d’une conscience droite à l’égard de Dieu le Père, en Christ et dans
l’Esprit.
Passons au deuxième temps : Posons-nous la question : « Où et quand les Douze ont-ils été
baptisés ? ». La réponse à cette question va nous aider à rentrer plus avant dans le mystère de
notre baptême.

(Questionner l’assemblée ou poursuivre par le paragraphe suivant)

HoméliesB_Car01_Baptême

Certains d’entre vous me diront : « Au Jourdain». Effectivement la plupart des Douze, sinon tous, ont fréquenté
le prophète Jean et se sont laissés baptiser de ses mains. Mais ce baptême était-il déjà chrétien ? Non. Tout au
plus en était-il l’amorce.
D’autres me diront : « Au Cénacle, lors de la descente de l’Esprit Saint sous l’apparence de langues de feu ».
Effectivement le don de l’Esprit appartient au baptême chrétien, et en constitue même le point d’orgue, mais il
n’en est pas la totalité.
Vos (ces) deux réponses contiennent leur part de vérité, mais l’une et l’autre pèchent par
insuffisance. Jésus y est oublié. Or nous savons que son rôle y est essentiel.
En fait le baptême des Douze s’est étalé sur les trois années du ministère de Jésus, depuis son
séjour au Jourdain jusqu’à la Pentecôte (hors rites pour les 2/3). On peut y distinguer trois
étapes dans leur baptême : l’étape du Jourdain, la première, vécue autour du prophète Jean,
puis l’étape de la Galilée, durant laquelle les disciples suivent Jésus, et enfin l’étape de
l’Ascension – Pentecôte où ils reçoivent l’Esprit Saint et sont rassemblés en un peuple
nouveau. J’appelle la première étape, celle du Père ; la deuxième, celle du Fils ; et la
troisième, celle de l’Esprit.
Dans le baptême chrétien, nous retrouvons ces trois étapes, mais entremêlées l’une dans
l’autre. Le baptême chrétien a retenu de l’étape du Jourdain (la première) l’initiative divine,
celle du Père qui appelle tout homme à revenir à Lui (à se tourner vers lui) à travers un rite
unique non renouvelable, vécu dans une confession de foi consciente : l'immersion dans l'eau.
C’est la deuxième étape qui a donné au baptême chrétien son originalité laquelle consiste à
nous greffer sur Jésus : "Croyez en Dieu, mais aussi en moi !" (Jn 14,1)
En effet le baptême chrétien nous engage à la suite de Jésus, nous met à l’écoute de Jésus,
nous entraîne avec Jésus sur le chemin des pauvres; il nous revêt du Christ, càd de son mode
de vie, de sa confiance radicale à son Père; le baptême nous associe à sa mort en croix par
amour des hommes et de son Père.
Le baptême chrétien trouve son point d’orgue dans la troisième étape. En effet le baptême
chrétien a pour but ultime : notre illumination par l’Esprit, notre entrée dans le Corps du
Christ, et notre découverte du vrai nom de Dieu (Père, Amour, Dieu autre)
Pour terminer ce parcours marathon, un mot encore sur son rite majeur du baptême chrétien,
càd l’immersion (réduite aujourd’hui à une simple ablution).
A l’origine, le rite de l’immersion appartenait exclusivement à la première étape, celle du
Jourdain. Aujourd’hui il tire sa signification et du Père, et du Fils et de l’Esprit. Autrement
dit, l’eau baptismale évoque non seulement l’idée de "conversion", mais aussi celle
d’immersion dans la tendresse du Père, de plongée dans la mort du Christ pour "la rémission
des péchés" et d'imprégnation de l’Esprit Saint pour notre renaissance. Et le tout dans « un
engagement envers Dieu avec une conscience droite ». I Pierre 3,21
(Aspersion des fidèles)

Homélie du 3ème dimanche de carême

Jésus chasse les marchands du temple
Ex 20,1-17; 1 Co 1,22-25; Jean 2,13-25

Par Ignace Plissart

J’entends souvent cette réflexion : « Monsieur l’abbé, ne me dites pas que Jésus n’a jamais
péché ! Ne s’est-il pas mis en colère sur les marchands du temple ? »
L’argument témoigne d’une profonde incompréhension de l’action publique de Jésus au
Temple. Or nous sommes là devant ce qu’on appelle ‘une sainte colère’. Car contrairement à
une certaine opinion, toute colère n’est pas mauvaise. « Il est des situations, nous dit saint
Bernard, où ne point s’irriter est péché ». Néanmoins il ajoute qu’une sainte colère doit être
juste, maîtrisée, bienveillante et exceptionnelle. Non seulement le geste de Jésus ne mérite
aucun reproche, mais il mérite mieux : il participe à la noblesse des ‘actions symboliques’ des
grands prophètes.
Une action prophétique (ou symbolique) est un geste exceptionnel, inattendu, hors du
commun, dont le but est de forcer l’attention d’un large auditoire pour lui transmettre un
message divin que les seuls mots n’arrivent pas à dire. Pour ce faire, toujours l’action
symbolique provoque, écorne les convenances.
Un jour, alors que la Judée était menacée d’occupation par les armées de Nabuchodonosor et que les autorités
de Jérusalem pensaient trouver leur salut en demandant la protection de l’Égypte, Jérémie convoque les
habitants de la ville, puis leur ayant présenté une maquette du Temple en terre cuite, la projette vers le sol où
elle éclate en mille morceaux. (Déjà à cette époque, on vendait ce genre d’article dans les boutiques voisinant
le temple de Jérusalem !) Après un temps de silence, il dit à la foule étonnée : « Voilà ce qu’il adviendra de
Jérusalem, si vous tentez de résister au roi de Babylone.» (Jé 7,12-15)
Gandhi lui aussi a eu recours à l’action symbolique. Ceux d’entre vous qui ont vu ce grand film qui porte son
nom se souviendront de cette scène bouleversante où en présence de ses partisans, il tente de jeter ses papiers
d’identité dans un brasero sous les coups de policiers anglais, et ce pour protester contre la discrimination
dont ses frères de race étaient l’objet.
Ceci dit, observons en détail le déroulement de son action prophétique.
Jésus la commence en faisant un fouet à l’aide de cordes qu’il trouve à même le sol.
Armé de ce fouet, il pousse les bestiaux hors du temple. Leurs propriétaires les suivent moins
par peur qu’impressionnés par l’assurance de Jésus. Puis Jésus renverse les comptoirs des
changeurs, répandant leur monnaie sur le sol (L’argent n’est-il pas la moindre des choses !
Luc 16). Enfin il ordonne aux marchands de colombes d’emporter leurs cages, en leur disant :
« Ne faites pas de la maison de mon Père, une maison de trafic. »
Deux remarques :
– J’ai beau cherché, je ne vois aucune trace de violence, mais seulement une force toute
maîtrisée. Le fouet improvisé n’a effrayé personne. Et si vous ressentez quelque gène pour les
pièces éparpillées, rassurez-vous : tout de suite, avant de quitter le temple, leurs propriétaires
les ont récupérées. A l’égard des colombes, symboles de paix, Jésus se montre très délicat, il
ne renverse aucune de leurs cages, il se contente de demander à leurs propriétaires de les
emporter avec eux, évitant ainsi aux colombes la torture d’un sacrifice. Par contre, Jésus ne
prend aucune précaution pour se protéger des réactions que son geste déclencherait. Or les
vrais violents veillent à leur protection rapprochée et lointaine.
– Comme l’exige toute action prophétique, Jésus adresse à son auditoire une parole
forte dont l’évangéliste nous rapporte l’essentiel : « Ne faites pas de la maison de mon Père
une maison de trafic. » Ce message fait écho au livre du prophète Zacharie et plus
particulièrement à la dernière page de son livre, à son dernier verset : « En ces jours-là, dans
la maison du Seigneur Yahvé, il n’y aura plus de trafiquants ! » (14,21).

HoméliesB_Car03_MarchandsTemple

Ce verset contient, et une bonne nouvelle, et un appel à la conversion. La bonne nouvelle est qu’aujourd’hui
le Royaume de Dieu a commencé à germer au milieu de vous, que le Jour du Seigneur s’est enfin levé, que la
purification de son Temple vient de débuter ! Et l’appel à la conversion : Vous avez transformé la Maison de
Yahvé en une maison de trafic, de commerce, alors que sa mission est de favoriser un culte d’adoration « en
esprit et en vérité » ; le moment est venu de vous convertir, de reconnaître votre responsabilité dans l’errance
du peuple de Dieu ; Dieu est plein de miséricorde.
Comment réagissent les autorités du temple ?
Le lendemain, (selon Marc), elles viennent à lui et le pressent à se justifier : « Quel signe,
peux-tu nous donner pour justifier ce que tu as fait là, càd dénoncer le culte que nous
organisons ici dans le Temple ?
En fait les autorités du Temple ne lui reprochent pas son action publique, mais mettent en
doute sa légitimité. A leurs yeux, seul un signe, entendons un miracle, une intervention
manifeste de la puissance divine, pourrait prouver son bon droit. Un signe, tel que « la
traversée de la Mer Rouge, la manne tombant du ciel, la traversée à pieds secs du Jourdain, la
conquête fulgurante du pays de Chanaan, etc.). L’apôtre Paul évoque ce genre de signes
réclamés par les pharisiens, les scribes et les Sadducéens en I Co 1,22-23
« Les juifs demandent des signes (des miracles) et les Grecs recherchent la sagesse (des
arguments de la raison raisonnante). Mais nous, nous prêchons un messie crucifié, scandale
pour les Juifs, folie pour les païens, mais pour ceux qui sont appelés, tant Juifs que Grecs, il

est le Christ, puissance de Dieu et sagesse de Dieu. ».

Les autorités du temple pressent donc Jésus à se justifier par un signe, un miracle, un prodige.
Jésus s’y refuse, laissant entendre que son geste, non-violent et inscrit dans la tradition
prophétique, ne demande aucune confirmation car il est en lui-même la signature de la
« vraie » puissance de Dieu qui est humilité, abaissement, non-violence et bienveillance. Ne
comprenez-vous pas, leur dit Jésus, que le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, qui est le
vôtre et le mien, n’est pas celui que vous imaginez ! Notre Dieu est un Dieu « autre, tout
autre ». Ce n’est pas dans le tonnerre et l’ouragan qu’Il appelle à la conversion, mais dans « la
brise légère ». Hier, c’était dans la brise légère de mon agir et de ma parole, que Dieu vous
appelait à vous remettre en question et à proposer au peuple la seule adoration qui lui plaise,
l’adoration « en vérité et en esprit » (Jean 5)
La réponse de Jésus scandalise les autorités du Temple ! À travers son action, humble et non-
violente, Jésus vient de leur révéler une tout autre image de Dieu, une image incompatible
avec la leur, une image inédite, reconnaissons-le, jugée « folie » aux yeux du monde. Oui,
Jésus les exhorte, au nom même de leur Dieu, de rompre avec l’image toute puissante qu’ils
s’en étaient fait, et avec la manière toute mercantile d’organiser son culte. Ils voyaient Dieu,
tel un dieu tout puissant, interférant directement dans l’histoire des hommes, arbitrant leurs
différends, châtiant les méchants, comblant les bons de bienfaits, un dieu mêle-tout, un dieu
exigeant des sacrifices, un dieu négociant le salut contre des œuvres religieuses, tout à
l’inverse de la nouvelle image que Jésus leur révèle.
Refusant de rompre avec leur image de Dieu, au nom même de leur Dieu, ils concluront que
Jésus ne pouvait être ni le Grand prophète, ni le Messie, et que donc il méritait la mort pour
avoir blasphémé contre Dieu et son Temple.

Homélie du 4ème dimanche du carême

Le Fils de l’homme est venu non pour juger,

mais pour que le monde soit sauvé !

2Chr 36,14…23; Eph 2,4-10; Jean 3,14-21

Par Ignace Plissart

L’évangile de ce jour évoque un étrange épisode de l’Ancien Testament, celui d’un serpent d’airain qui avait pouvoir de guérir (Lire Nb 21,4-9).

Cet épisode constitue une infraction caractérisée à la Torah, et plus précisément au premier commandement du Décalogue ; il déroute nos frères Juifs (Israélites):

 

« Tu ne te feras aucune image sculptée,

rien qui ressemble à ce qui est dans les cieux là-haut,

ou sur la terre ici-bas

ou dans les eaux au-dessous de la terre. » Ex 20,4

 

Alors que le décalogue interdit toute image sculptée, le Seigneur ordonne à Moïse d’en façonner une. Pourquoi le Seigneur Dieu enfreint-il sa propre loi ? Pourquoi ordonne-t-il à Moïse, ce qu’antérieurement il lui avait interdit de faire ?

Cette question laisse perplexes les adeptes du judaïsme.

Les chrétiens, quant à eux,  n’y voient pas vraiment de problème !

Primo, nous pensons qu’aucune loi divine n’est absolue, hormis ces deux commandements : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » et « Tu ne haïras pas ton prochain« . Et puis si Dieu est ce bon père, il ne peut que tolérer des exceptions à ses propres règles. Quel est le parent qui ne fait pas de même pour ses enfants !

 

Secundo, une loi qui était justifiée à une époque, peut ne plus l’être à une autre. Au temps où les Hébreux étaient tentés de vénérer les idoles en or massif des Cananéens, cet interdit avait toute sa raison d’être.

 

Tertio, nous pensons aussi qu’à travers cette transgression mineure, le Seigneur préparait les cœurs à en accepter une autre, beaucoup plus importante encore, celle de l’incarnation de la Sagesse de Dieu en Jésus. Jésus n’est-il pas l’image de Dieu ?

« Qui me voit, voit le Père, dit Jésus » Jn 14,19

 

Mais revenons au récit des petits serpents qui menaçaient les Hébreux. Ce récit nous enseigne deux choses :

La première : Que nous sommes tous sont grandement menacés par tous genres de morsures mortelles, celle de la haine, de la division, de la convoitise, de l’idolâtrie, etc.

Et la deuxième : Que pour nous vacciner de ces morsures mortels, il nous faut contempler celui qui nous a aimés jusqu’à l’extrême (Jésus en croix) et nous adjoindre à son Corps que forment ceux qui vivent de son Esprit et de sa Parole. Oui, nous avons besoin de contempler Jésus comme l’ont fait les saintes femmes au calvaire et de faire corps entre nous disciples de Jésus :

 

« Il y avait là de nombreuses femmes qui regardaient Jésus à distance,

celles-là même qui l’avaient suivi depuis la Galilée. » Mc 15,40

 

C’est ce que l’évangéliste nous dit à sa manière dans cette admirable formule :

« Le Fils de l’homme est venu non pas pour juger, mais pour que le monde soit sauvé. » Jn 3,17

 

Oui, le Fils de l’homme, tel un médecin, est venu pour que le monde soit sauvé, guéri, relevé, et il n’est pas venu pour le juger, le condamner, le châtier. Jésus en croix est le signe le plus clair de cette sollicitude de Dieu à l’égard d’une humanité profondément blessée, et incapable d’aimer par ses seules forces. Nous avons besoin de Jésus. « Jésus, tu es le seul vrai médecin de nos âmes et de nos corps ! »

 

Si l’évangile de ce jour s’était clôturé sur le verset que nous venons de citer : Le Fils de l’homme est venu non pour juger, mais pour que le monde soit sauvé », c’eut été parfait. Mais le verset qui lui fait suite semble tout remettre en question :

 

« Celui qui croit dans le Fils de l’homme échappe au jugement,  celui qui ne veut pas croire, est déjà jugé, parce qu’il n’a pas cru au nom du Fils unique de Dieu. » Jn 3,18

 

Dans ce verset, Dieu semble retirer d’une main ce qu’il avait donné de l’autre. Alors qu’il s’était engagé à ne pas juger, et le voilà qu’il annonce un jugement. Alors quoi ?

Effectivement ce verset fait problème. Dans le passé, des chrétiens l’ont exploité pour fermer les portes du Royaume aux païens et aux incroyants, càd à ceux qui vivaient dans l’ignorance de Jésus, ou qui, le connaissant, ne lui reconnaissaient pas sa dignité de Fils Unique de Dieu.

Aujourd’hui ces chrétiens se font rares. N’empêche que beaucoup d’entre eux continuent de ressentir un malaise, écartelés entre la conviction profonde que le Royaume n’est fermé à aucun humain, et ce verset qui semble affirmer le contraire.

 

Pour retrouver la sérénité, et du même coup sauver la bonté divine, il nous faut examiner de plus près deux groupes de mots du verset incriminé : « être jugé » et « qui ne veut pas croire »

 

Concernant le premier groupe, la question suivante se pose : « Par qui est-il jugé, celui qui ne veut pas croire ?  » Le texte ne le précise pas !  Serait-il jugé par le Fils de l’homme ? Si c’était le cas, nous aurions là une contradiction dans les termes : simultanément le Fils de l’homme jugerait et ne jugerait pas. Alors par qui est-il jugé celui qui ne veut pas croire ? Mais par lui-même !  C’est lui qui se condamne et personne d’autre !  Le verset 19 confirme cette lecture:

 

« Et le jugement, le voici : Quand la lumière est venue dans le monde,

des hommes ont préféré les ténèbres à la lumière, parce que leurs œuvres étaient mauvaises. »

 

Quand je suis malade, si je refuse de le reconnaître, ou  m’obstine à refuser l’aide de celui qui pourrait m’aider, n’est-ce pas moi et moi seul qui me condamne à rester malade ou à sombrer dans la mort. Oui, le grand désir du Fils de l’homme est que chacun de nous guérisse, que chacun de nous vive pleinement. Imaginer le contraire s’oppose à une saine lecture de l’évangile ! Restons fermement attachés à cette conviction que le Fils de l’homme est venu pour que le monde soit sauvé, soit libéré.

 

Abordons le deuxième groupe de mots : « Se condamne celui qui ne veut pas croire ?

Première réflexion : Ceux qui ne connaissent pas Jésus, parce qu’ils ne l’ont jamais vraiment rencontré, peuvent difficilement « ne pas vouloir » croire en lui. Autrement dit la condamnation lié au fait de ne pas croire au Fils unique de Dieu ne les concernent pas.

Deuxième réflexion : Dans l’expression « celui qui ne veut pas croire », l’objet de la foi n’est pas précisé. Cela veut dire que la foi dont il est question dans ce verset, passe aussi et peut-être d’abord, à travers une obéissance à la  vie, aux appels de ma conscience, à cette part de divin qui m’habite, aux appels des petits, aux grands préceptes de ma tradition religieuse, etc. Autrement dit, un homme peut s’inscrire dans la foi en Jésus Fils unique de Dieu sans pour autant le connaître explicitement. Cette parole de Jésus, tirée du récit du Jugement dernier, nous le confirme :

 

« Ce que vous avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. »

Mt 25,40

Réfugiés : comment mieux les accueillir ?

Le vicariat propose une brochure pour nous guider dans l’accueil des réfugiés. La brochure – gratuite – est disponible dès à présent en cliquant ici, sur demande auprès des responsables d’Unités Pastorales, ou via le Service Solidarité solidarite@vicariat-bruxelles.be / 02/ 533 29 60.

Depuis 2015, de nombreuses personnes migrent vers l’Europe à la suite de différentes guerres civiles, des situations politiques et économiques et de l’aggravation de conflits internationaux. Ne sachant obtenir directement un statut (réfugié, protection subsidiaire, et…) à travers les ambassades, les migrants sont obligés de rémunérer des passeurs pour se rendre sur le territoire de l’Union européenne, en prenant de grands risques.

La Foi chrétienne et l’accueil de l’étranger sont des réalités indissociables. Le pape François l’a montré dès son élection par un voyage sur l’île de Lampedusa, et l’a souvent répété devant les plus hautes autorités en Europe et dans le monde. « Tout immigré qui frappe à notre porte est une occasion de rencontre avec Jésus-Christ, qui s’identifie à l’étranger de toute époque accueilli ou rejeté (Mt, 25, 35.43) ». Les évêques de Belgique lui ont emboité le pas par différentes initiatives.

Questions & réponses
Pour aider les communautés chrétiennes qui, à Bruxelles, se sentent concernées, la brochure clarifie les nombreuses questions. « Qui est qui ? » – « Qui fait quoi ? » Elle explique la procédure d’asile et propose des pistes pour « Comment aider et avec quel partenaire ? ».
On y trouve une liste de propositions pour aider à la constitution d’un groupe d’accueil en unité pastorale et les différentes manières d’entrer dans un bénévolat.
Une liste des associations d’aide de proximité est mentionnée ainsi que les manières de réaliser des dons en nature ou de proposer un logement à des conditions solidaires.

Infos pratiques
Contact presse : Père Tommy Scholtes s.j., Porte-parole francophone de l’Archevêché de Malines-Bruxelles, E-mail : t.scholtes@interdio.be & Gsm : 0475 67 04 27.

Des propositions pour vivre le carême

Le Carême commence ce 14 février !  L’occasion de se préparer le coeur en vue de pouvoir vivre pleinement et intensément la fête la plus importante des chrétiens, celle de Pâques !  La Pastorale des Jeunes de Bruxelles vous suggère quelques propositions pour bien vivre ce Carême 2018 et vous invite à plusieurs évènements de taille !  Ils comptent sur votre présence pour soutenir notre Eglise et lui montrer un visage jeune et dynamique.

Bon Carême à tous !

Abbé Jehison, Bénédicte, Olivier et Virginie.

https://jeunescathos-bxl.org/fr/actualites/vivre-le-careme-2018

Dimanche Autrement de février

 

 

Nous ne sommes pas des marionnettes agitées par des ressorts contraires,

mais des vivants libres et responsables comme Dieu l’a voulu,

qui avons fait des choix sur notre route, dans des situations ordinaires ou extrêmes.

Le carême, route de 40 jours pour renaître, est un temps

pour cheminer ainsi, avec nos efforts et nos faiblesses.

 

 

Voilà le contexte de ce Dimanche Autrement, 2ème dimanche de carême.

A partir de l’évangile des tentations nous réfléchirons à la vraie liberté,

celle qui vient de la maîtrise de soi et du don de soi.

 

Appel aux dons pour le projet Chevrefeuille

La maison d’accueil Chevrefeuille fait une appel spécifique aux dons en ce début d’année 2018, que vous pouvez déposer au fond de l’église.

Ils nous disent ceci:

Nous avons besoin en ce moment de :
- Draps pour les lits-cage (dessus dessous)
- Draps pour des lits d’une personne (draps housse pour le dessous et autres pour le dessus)
- Chauffe-biberons
- Couverts
- Casseroles
- Verres
- Essuies de vaisselle
- Bavoirs
- Gants de toilette
- Vêtements de grossesse

Dimanche Autrement de janvier

Vous êtes le sel de la terre. Vous êtes la lumière du monde.

Ces phrases d’évangile sont un message très personnel, qui nous rappellent à chacun que nous sommes appelés à rayonner, à être « Univer-Sel ».

Prenons le temps de nous laisser interpelller par ces mots dimanche, de méditer leur sens et de les traduire dans nos vies.

Quelles sont mes missions, mes responsabilités?

Comment suis-je lumière pour les autres dans ces responsabilités?

Et où puis-je bien rayonner?